Pâques 2021

Spectacle désastreux et contemplation du don d’une vie nouvelle

Nous voilà arrivés à Pâques 2021. Nous répétons l’exclamation vieille de plus de deux mille ans:

Le Christ est ressuscité!

Ce faisant, nous affirmons en même temps qu’il était mort, car une résurrection se produit uniquement suite à une mort.

Si nous devions attribuer des mots-clés à ces deux événements, quels seraient-ils ?
Vendredi saint :
Peur, trahison, déception, désillusion, violence, mépris, déni, humiliation, dégradation, douleur, souffrance, mort, mort…..
Pâques :
Incertitude, vide, tombeau vide, dimanche matin, lever du soleil, nouveaux départs, joie, excitation, nouvel espoir, soulagement, vie, nouveau défi…..

Le vendredi saint est un spectacle de la mort. Il y a énormément de bruit, de mensonges, de violence, de trahison, de souffrance. Même la nature est remontée…

Pâques par contre est un nouveau départ vers une nouvelle vie sans spectacle. Comme une aube pascale, Pâques révèle la puissance silencieuse et non-violente de Dieu qui fait de choses nouvelles là, où l’on ne les attendait plus. Apparemment, les disciples n’en avaient rien compris.

A Pâques, par la résurrection, nous recevons une perspective nouvelle sur la vie. L’hiver passé, nous pensions qu’à Pâques, nous serons sortis de la Pandémie. Il n’en était rien. Pourtant, nous célébrons la résurrection qui nous donne une perspective autre que celle devenue courante. Jean-Claude Guillebaud écrit: Le premier confinement fut marqué par une peur générale et un désordre durable des esprits. Il a raison: la peur et le désordre de l’esprit pousse les disciples de Jésus à se retirer et se cacher. Si Marie ne les avait pas cherchés, ils seraient passés à coté de Pâques!

La peur, la désillusion, le désordre de l’esprit, qu’il soit crée par nos problèmes ou par la pandémie, ou par notre imagination, nous empêchent de contempler la miséricorde de Dieu comme l’on contemple l’aube, le réveil printanier de la nature. Faute d’être pressé et stressé, à la recherche de plus de bonheur ou de plus de profit, nous risquons de passer à coté du miracle de la vie et de la résurrection.

Rien dans ce monde et rien dans la bible nous montre qui est Dieu, si ce n’est Jésus de Nazareth, le crucifié et le ressuscité. C’est par lui que nous connaissons Dieu.

Conclusion
Pâques est le jour ou le moment où la perspective de la vie est redéfinie et réaffirmée au milieu d’une vie désillusionnée et d’un monde perturbé par la haine et la violence: La lumière vient dans l’obscurité. L’obscurité peut être vaste, mais elle n’est pas dénuée de sens et elle n’est pas infinie. C’est le lieu où, grâce à la lumière, la vérité est révélée et où une nouvelle réalité émerge – grâce à la puissance créatrice de Dieu.

Sur le chemin de la résurrection se trouve la croix, et le chemin de la croix, qui est le chemin de l’amour et de la miséricorde, mène à la résurrection. Mais ceux-ci sont accessibles à l’œil intérieur, qui s’arrête pour retracer et contempler le mystère de la vie.

Vendredi saint: participer à la souffrance de Dieu dans le monde

Le chrétien n’a pas, comme les croyants des mythes de la rédemption, dans ses tâches et ses difficultés terrestres encore une dernière fuite dans l’éternel. Il doit savourer la vie terrestre complètement comme le Christ ( » Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? « ) et seulement en faisant cela le Crucifié et Ressuscité est avec lui et il est crucifié et ressuscité avec le Christ. Ce monde ne doit pas être annulé prématurément. En cela, l’Ancien et le Nouveau Testament restent connectés. Les mythes de rédemption naissent d’expériences humaines limites. Mais le Christ saisit l’être humain au milieu de sa vie.
Dieu se laisse pousser hors du monde sur la croix, Dieu est impuissant et faible dans le monde, et c’est précisément et uniquement de cette manière qu’il est avec nous et nous aide.
Être chrétien ne signifie pas être religieux d’une certaine manière, faire quelque chose soi-même sur la base d’une certaine méthodologie (pécheur, pénitent ou saint), mais être chrétien signifie être humain, non pas un type d’être humain, mais l’être humain que le Christ crée en nous. Ce n’est pas l’acte religieux qui fait le chrétien, mais la participation à la souffrance de Dieu dans la vie du monde.

Hans-Ruedi Weber, « Und kreuzigten ihn. Meditationen und Bilder aus zwei Jahrtausenden, Göttingen 1979)

Les hommes vont à Dieu dans leur misère
Et demandent du secours, du bonheur et du pain
Demandant d’être sauvés de la maladie, de la faute et de la mort,
Tous font cela, tous chrétiens et païens.

Des hommes vont à Dieu dans sa misère
Le trouvent pauvre et méprisé, sans asile et sans pain,
Le voient abîmé sous le péché, la faiblesse et la mort.
Les chrétiens sont avec Dieu dans sa Passion.

Dieu va vers tous les hommes dans leur misère,
Dieu rassasie leurs corps et leur âme de son Pain.
Pour les chrétiens et pour les païens, Dieu souffre la mort de la croix
et son pardon est pour tous, chrétiens et païens.

Dietrich Bonhoeffer (1906 – 1945) Pasteur, théologien engagé en Allemagne contre le nazisme et Hiltler, exécuté juste avant la fin de la guerre.